Impact des protéodies sur l'Esca d'une parcelle de mourvèdre (2018‑2021)

Site expérimental et protocole

Le suivi porte sur une parcelle de 20 ha de mourvèdre au Domaine du Bois-des-Dames (Violès, Côtes-du-Rhône), longue de 1 450 m et divisée en cinq îlots plantés entre 2003 et 2005. Avant l'essai, la mortalité annuelle attribuée à l'Esca était estimée entre 4 et 7 % par an.

Un diffuseur sonore Génodics a été installé le 24 avril 2018 entre les îlots 1 et 2 (47^e rang en partant de l'ouest). Sa portée théorique de 300 m a été dépassée dans les conditions locales (sons audibles jusqu'à 500 m), ce qui a permis de comparer deux zones : îlots proches (1–3) majoritairement couverts et îlots plus éloignés (4–5) servant de témoins.

Les suivis ont privilégié le comptage des ceps morts ou agonisants en fin de saison, complétés par l'observation des symptômes foliaires. Les diffusions ont été assurées deux fois par jour durant les périodes végétatives.

Résultats intermédiaires (2018–2019)

Comptage Genodics (septembre 2019, 9 258 emplacements)

Les symptômes foliaires suivaient la même tendance, avec +90 % de ceps symptomatiques en zone éloignée pour la plantation 2004, contre +32 % pour celle de 2003. Ces écarts bénéfiques traduisent une atténuation nette de l'Esca autour du diffuseur.

Évaluation CA84 (août 2019)

La Chambre d'agriculture du Vaucluse a comparé deux tronçons de 200 m sur quatre rangs et n'a pas observé de diminution des improductifs. Genodics a contesté cette analyse en rappelant que la zone « témoin » se trouvait encore sous influence sonore (audibilité à 500 m) et que son propre comptage montrait 5,72 % de mortalité dans la zone couverte contre 8,94 % plus loin. Malgré cette divergence, les données internes continuent d'afficher un signal positif.

Suivi consolidé sur quatre ans (2018–2021)

Un relevé interne (début octobre 2021) a porté sur 20 % des rangs de chaque îlot. Les résultats ramenés à 1 000 pieds montrent une dynamique encourageante sur la zone stimulée.

En appliquant ces pourcentages aux emplacements de chaque îlot, Génodics estime qu'environ 555 ceps sont épargnés chaque année dans la zone stimulée (îlots 1–3), soit un gain cumulé de 3 700 « pieds × années ». Pour un coût de prestation de 5 000 €, le bénéfice net projeté sur quatre ans atteint ≈6 438 €, confirmant la viabilité économique de la campagne.

Les auteurs soulignent que l'effet recherché n'est pas l'éradication de l'Esca mais l'allongement de la durée de vie productive des ceps. L'hétérogénéité des symptômes foliaires et la portée acoustique variable (vent du nord, air sec) sont identifiées comme des limites méthodologiques.

Discussion et perspectives

• Confirmation partielle : l'écart de mortalité entre zones stimulées et non stimulées atteint environ 30 % sur quatre ans, inférieur aux attentes initiales (>50 %).
• Facteurs confondants : irrigation possible, qualité de l'air, orientation des vents et âge de la vigne (17–19 ans) peuvent limiter l'effet mesuré.
• Réplicabilité : les critiques de la CA84 illustrent l'importance de définir des zones témoins réellement hors influence sonore et de suivre annuellement les pieds vivants pour calculer des mortalités réelles.
• Arrêt du test : compte tenu de la mortalité résiduelle élevée, le propriétaire prévoit de renouveler la parcelle sous deux à trois ans, tout en observant l'évolution post‑arrêt des diffusions comme contrôle supplémentaire.

Conclusion

L'expérimentation de quatre ans suggère un effet bénéfique des protéodies sur la mortalité liée à l'Esca, avec une réduction moyenne d'environ un tiers par rapport aux zones plus éloignées. Le maintien de plusieurs centaines de ceps par an et un retour sur investissement positif témoignent du succès de cette campagne. Le dispositif gagnerait à être renforcé (deux diffuseurs) et à être évalué sur des témoins clairement hors portée acoustique, afin de consolider ces résultats prometteurs.